Y'a-t-il philosophie et Philosophie ?

par Alain Sévère

Paru dans l'Incendiaire n°2, novembre 1997
2 pages

Résumé

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Cher David, Chers lecteurs de l'Incendiaire,
Y a-t-il philosophie et Philosophie? Y a-t-il une vraie et une pseudo Philosophie. Même si l'article du N° 7 me laisse penser, lecteur profane que je suis, que la philosophie doit sortir du conformisme institutionnel, je me suis inquiété quand j'ai lu : "Nous voudrions qu'à la longue, cette pratique [celle des cafés philo] donne envie … de faire véritablement de la philosophie." On ne ferait donc pas véritablement de la philosophie au café philo. Le sujet reste ouvert certes mais je pense que si, effectivement, il n'émerge pas de ces assemblées de nouveaux penseurs institutionnels, ces discussions amènent chacun des participants, à titre individuel à se poser quelques questions existentielles pas forcément de fond mais sur la vie quotidienne. Pourquoi réagit-on de telle ou telle manière, quelle est la place de chacun dans la société, de quel type de société voudrait-on…
A mon avis, même si on n'y retrouve rien de très original par rapport à ce qui a été dit depuis Socrate, cela permet justement d'avoir un regard critique sur les textes de référence et sur la vie. Ce regard nouveau permet aussi de faire évoluer, d'adapter au monde actuel les thèses passées. Ces cafés philo sont donc à part entière une école de philosophie et je ne crois pas que de s'inscrire "dans des cours de formation continue de philosophie, et peut-être même en faculté de philosophie" soit un but de ces cafés ou groupes de discussion qui se veulent en marge de l'institution !
Par contre que le besoin de connaître certaines références soit crée, j'en conviens et il est sûrement possible de les instiller dans les cafés philo. Elles ne sont pourtant pas indispensables. Comment faisaient les philosophes anciens qui n'avaient pas ou si peu de textes de référence. La philosophie a, à l'origine, été populaire et si l'institution l'a sclérosée peut-être que ce n'est pas sa faute mais plutôt celle d'une absence de débat public dans tous les domaines.
De Grands mouvements philosophiques se sont-ils développés dans les dites démocraties modernes ? J'en doute car elles ne favorisent pas la confrontation des idées. C'est peut-être la plus grande maladie dégénérative du millénaire.
Nous sommes en effet en droit de nous poser quelques questions à propos de la démocratie telle que nous la vivons ou plutôt telle que nous la subissons. Quelle est la représentativité des élus? Sur quelles idées remportent-ils l'adhésion des suffrages, que font-ils de leur mandat?
Il suffit de voir le fonctionnement des enquêtes d'utilité publique. Elles se font en catimini sur des décisions qui sont prises et qu'aucun particulier ne peut infléchir s'il ne représente pas un pouvoir économique de poids. Idem pour les séances de conseil municipal, où le public est rarement nombreux et surtout pas consulté. Nos politiques locaux adhèrent à un programme national alors qu'ils devraient faire la synthèse des aspirations des citoyens.
Qui possède le pouvoir? Les politiques? J'en doute car ils n'ont pour la plupart aucune visée à long terme et aucun débat de fond. De plus ils sortent tous du même moule institutionnel. Les économiques, ont au moins un but : s'enrichir au dépends des autres. Le rôle des politiques de droite étant plutôt de leur faciliter la tâche, celle de gauche de les freiner, sans remettre en cause leurs privilèges, leurs appétits. Que fait le peuple? Rien ! Moi le premier, j'utilise ces lignes pour cracher mon venin mais demain j'irai travailler, je paierai mes impôts, et j'irai voter pour X pour Y sans lui demander trop de garanties ni de comptes.
Les cafés philo sont-ils le signe d'une émergence d'une nouvelle société? Si le phénomène prend de l'ampleur, cela se peut. La communication par internet est un atout mais cet écran d'ordinateur interposé rend le débat moins passionné.
En tout cas il ne faut pas laisser cet espace vide de discussion populaire (à condition d'avoir les moyens de s'acheter le matériel, mais après tout c'est un choix entre l'ordinateur et la télé 16/9 par satellite). Le Peuple doit se réapproprier la Res Publica Comment? Sinon par le débat?… Tant qu'il lui reste quelques neurones fonctionnels.
A.S.

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