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Wittgenstein (1889-1951)

par Jean-François Chazerans

 

Paru dans l'Incendiaire n°4, janvier 1998
6 pages



Résumé

C'est le philosophe du mois ! Donc vous trouverez sa bio et sa biblio.

 

Sommaire rapide

Wittgenstein est le seul philosophe contemporain a avoir été l'instigateur de deux écoles philosophiques. Son Tractatus logico-philosophicus a inspiré le positivisme ou empirisme logique, et ses Investigations philosophiques l'école analytique. Il a d'ailleurs répudié ces deux écoles vu qu'il travaillait à l'élaboration d'une troisième philosophie.
De tous ceux qui l'avaient approché, personne n'a jamais douté que c'était un génie, même B. Russell écrit dans son auto-biographie, "C'est peut-être le plus parfait exemple que j'aie jamais connu du génie, tel qu'on le conçoit traditionnellement : passionné, profond, intense et dominateur. Il avait une espèce de pureté que je n'ai jamais vue égalée [...]. Je me rappelle que je l'avais emmené un jour à une réunion de la société Aristotélicienne, à laquelle assistaient plusieurs imbéciles que j'ai traités avec politesse. A la sortie je l'entendis rager contre ma dégradation morale consistant à n'avoir pas dit à ces hommes combien ils étaient sots" (tome II, p 115).
Il fut d'abord élève-ingénieur mais voulant approfondir les fondements des mathématiques il devint l'élève de Russell. Un jour il lui demanda : "Pensez-vous que je sois un parfait crétin ? Pourquoi tenez-vous tant à le savoir ? répliqua Russell. Parce que dit-il si je le suis, je me ferais aéronaute ; mais si je ne le suis pas, je me ferai philosophe". Russell lui demanda d'écrire un court traité sur un sujet de son choix et lorsqu'il l'eut en sa possession, à la lecture de la première ligne, il eu la conviction que W. était un homme de génie.
C'était un homme profondément malheureux, très tourmenté. Il était le dernier de 8 enfants, 5 frères et 3 sœurs. Son père était brillant et dominateur, son œdipe fut très difficile, trois de ses frères se suicidèrent et W. a été plusieurs tenté de le faire "il avait prit l'habitude se souvient Russell de venir tous les soirs à minuit et de tourner dans ma chambre comme un ours en cage. En arrivant il annonçait qu'en sortant de chez moi il se suiciderait...". "A l'instar de Schopenhauer, qu'il découvrit adolescent Lugwig était persuadé que la misère, physique ou morale était la toile de fond de toute existence et qu'on ne devait pas seulement regarder la mort en face mais lui faire bon accueil". Sa citation préférée était "N'oublies jamais, lorsque tout va bien, que rien n'oblige à ce qu'il en soit ainsi".
Il retourna en Allemagne, durant la première guerre mondiale, pour s'engager et il écrivit sa première œuvre le Tractatus logico-philosophicus dans les tranchés.
Après la guerre il hésite entre la prêtrise et le métier d'instituteur. Outre cela il dilapide son héritage colossal (son père était aussi riche que Krupps ou Carnegie), il en fait don à ses frères et sœurs et à de nombreux écrivains et artistes (Rilke, Loos etc...).
Afin de gagner sa vie il se fit instituteur dans un village d'autriche appelé Trattenbach (de 1920 à 1926). Il écrivait à Russell : "les gens de Trattenbach sont très méchants, Russell lui répondait : "oui, tous les hommes sont très méchants". Et il insistait : "c'est vrai, mais à Trattenbach ils sont plus méchants qu'ailleurs". Les paysans refusaient de lui fournir du lait parce qu'il enseignait à leurs enfant des additions qui ne se référaient pas à l'argent. Il a dû en ce temps là souffrir de faim et de privations considérables.
Il démissionna et devint jardinier dans un monastère. Il fut quelques temps tenté par la la vie monacale (période de mysticisme intense). Il devint architecte de sa soeur.
Après avoir rédigé le Tractatus logico-philosophicus, Il pensait être parvenu à résoudre tous les problèmes philosophiques, et se détourna de la philosophie. Il revint à elle quand il se sentit de nouveau capable de créer. Il passe son Ph D (Philosophy Degree = thèse de doctorat) en 1929 puis devient professeur à Cambridge.
Il avait une personnalité très forte, il était inquiétant et même souvent craint ; Un jour étant invité chez les Whitehead pour le thé, il arpenta la pièce en silence dans les deux sens durant un long moment, et finalement il explosa pour dire : "une proposition a deux pôles. Savoir apb". Whitehead lui demanda ce qu'était a et b. a et b sont indéfinissable répondit W. d'une voix de tonnerre. Il exerçait un grand ascendant sur son entourage, par le charme de son style il exerçait un puissant attrait sur ses élèves. Il craignait que sa forte influence soit nuisible à l'épanouissement de leur personnalité. Il était presque impossible de suivre son enseignement sans adopter ses modes d'expression, ses formules, ou même sans se mettre à imiter ses intonations ses attitudes, ses gestes.
En 1947 il quitte Cambridge pour s'isoler du monde dans une cabane de pécheur en Irlande. En 1949 on s'aperçut qu'il était atteint d'un cancer, il en meurt en 1951.
BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE
Ouvrages de Wittgenstein :
Wittgenstein (L.) : Tractatus logico-philosophicus suivi de Investigations philosophiques, Traduit de l'allemand par P. Klossowski, introdction de B. Russell, Gallimard, Paris, 1961, Tel n° 109, 365 p.
Wittgenstein (L.) : Remarques philosophiques, Edition posthume due aux soins de R. Rhees, traduit de l'allemand parJ. Fauve, Gallimard, Paris, 1975, Tel n° 809, 331 p.
Wittgenstein (L.) : Leçons et conversations sur l'esthétique, la psychologie et la croyance religieuse suivies de Conférences sur l'éthique, traduit par J. Fauve, Gallimard, Paris, 1971, Collection Idées n° 809, 175 p.
Wittgenstein (L.) : De la certitude, traduit par J. Fauve, Gallimard, Paris, 1976, Collection Idées n°344, 152 p.
Sur Wittgenstein :
Granger (G.-G.) : Wittgenstein, Seghers, Paris, 1969, p 5-90.
Jaccard (R.) : La légende des Wittgenstein, Le monde, 13 septembre 1991, p 19 et 25.
Malcolm (N.) : Ludwig Wittgenstein, dans Wittgenstein (L.) : Le cahier bleu et le cahier brun, traduit de l'anglais par G. Durand préface de J. Wahl , Gallimard, Paris, 1965, p 335-428.
Wright (G. H. von) : notice biographique, dans Wittgenstein (L.) : Le cahier bleu et le cahier brun suivi de Ludwig Wittgenstein par N. Malcolm, traduit de l'anglais par G. Durand préface de J. Wahl , Gallimard, Paris, 1965, p 311-333.
TEXTES
Tractatus logico-philosophicus
"4003- La plupart des propositions qui ont été écrites sur des matières philosophiques sont non pas fausses, mais dépourvues de sens. Pour cette raison, nous ne pouvons absolument pas répondre aux questions de ce genre mais seulement établir qu'elles sont dépourvues de sens. La plupart des propositions et des questions des philosophes viennent de ce que nous ne comprenons pas la logique de notre langage.
(Elles sont du même genre que la question de savoir si le Bien est plus ou moins identique que le beau.)
Et il n'est pas étonnant que les problèmes les plus profonds ne soient en somme nullement des problèmes.
40031- Toute philosophie est critique du langage [...]. Le mérite de Russell est d'avoir montré que la forme logique apparente du langage n'a pas besoin d'être sa forme réelle. [...]
4.11- La totalité des propositions vraies constitue la totalité des sciences de la nature.
4.111- La philosophie n'est aucune des sciences de la nature.
(Le mot " philosophie " doit signifier quelque chose qui est au-dessus ou au-dessous, mais non pas à côté des sciences de la nature.)
4.112- Le but de la philosophie est la clarification logique de la pensée.
La philosophie n'est pas une doctrine mais une activité.
Une œuvre philosophique consiste essentiellement en élucidations.
Le résultat de la philosophie n'est pas un nombre de " propositions philosophiques ", mais le fait que des propositions s'éclaircissent.
La philosophie a pour but de rendre claires et de délimiter rigoureusement les pensées qui autrement, pour ainsi dire, sont troubles et floues.
4.1121- La psychologie n'est pas plus apparentée à la philosophie qu'aucune autre des sciences de la nature.
La théorie de la connaissance constitue la philosophie de la psychologie.
Mon étude du langage des signes ne répond-il pas à l'étude des processus de pensée, que les philosophes ont tenue pour tellement essentielle à la philosophie de la logique ? Sauf qu'ils s'embrouillaient le plus souvent dans des investigations psychologiques inessentielles, et il y a un danger analogue dans ma propre méthode.
4.1122- La théorie darwiniste n'a pas plus de rapport avec la philosophie qu'aucune autre hypothèse des sciences de la nature.
4.113- La philosophie limite le domaine discutable des sciences de la nature.
4.114- Elle doit délimiter le concevable, et, de la sorte, l'inconcevable.
Elle doit limiter de l'intérieur l'inconcevable par le concevable.
4.115- Elle signifiera l'indicible, en représentant clairement le dicible.
4.116- Tout ce qui peut être en somme pensé, peut être clairement pensé. Tout ce qui se laisse exprimer, se laisse clairement exprimer. [...]
4.1212- Ce qui peut être montré ne peut pas être dit. [...]
6.211- [...].
(En philosophie la question de savoir " pourquoi utilisons-nous en somme tel mot, telle proposition " mène sans cesse à de précieuses élucidations.) [...]
6.522- Il y a assurément de l'inexprimable. Celui-ci se montre, il est l'élément mystique.
6.53- La juste méthode en philosophie serait en somme la suivante : ne rien dire sinon ce qui se peut dire, donc les propositions des sciences de la nature - donc - quelque chose qui n'a rien à voir avec la philosophie - et puis à chaque fois qu'un autre voudrait dire quelque chose de métaphysique, lui démontrer qu'il n'a pas donné de signification à certains signes dans ses propositions. Cette méthode ne serait pas satisfaisante pour l'autre - il n'aurait pas le sentiment que nous lui enseignons de la philosophie - mais elle serait la seule rigoureusement juste.
6.54- Mes propositions sont élucidantes à partir de ce fait que celui qui me comprend les reconnaît à la fin pour des non-sens, si, passant par elles, - sur elles - par-dessus elles, il est monté pour en sortir.
Il faut qu'il surmonte ces propositions ; alors il acquiert une juste vision du monde.
7- Ce dont on ne peut parler, il faut le taire.
(Ludwig Wittgenstein, Tractatus logico-philosophicus.)

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