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Editorial

par SF

 

Paru dans l'Incendiaire n°5, février 1998
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Résumé

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Sommaire rapide

Depuis quelques années, nous assistons à un retour aux traditions régionales. Notre société qui semble en crise économique et sociale, est à la recherche de valeurs et en particulier de valeurs passées. Nous baignons dans une nostalgie des modes de vie d'autrefois. Le mot à la mode aujourd'hui, c'est l'authenticité. Dans les magazines, à la télévision, on nous parle sans cesse de l'authentique. C'est ainsi que les recettes de cuisine sont authentiques, que les valeurs sont authentiques, que certains corps de métiers sont authentiques, etc.…Bien sûr, ce retour en arrière est accompagné par la volonté de faire une place aux dialectes locaux. Le patois, la langue orale que l'on utilisait autrefois dans nos campagne fait un retour en force. On l'étudie même à l'Université, on le traduit, on l'écrit.
C'est une aubaine pour les Bretons, Basques et autres Corses, pour qui la langue propre de leurs régions et les traditions qui l'accompagnent est importante. C'est ainsi qu'à l'aube du XXI° siècle, resurgissent des communautés régionales qui souhaitent plus que jamais se refermer sur elles-mêmes et discuter leur patois entre elles. A mon avis, plus qu'un retour à l'authentique -ce qui ne veut rien dire- ,on assiste à un retour aux régionalismes. Tous ces langages particuliers créent bien des traditions particulières, des danses, des contes, une histoire particulière. Mais est-ce vraiment un progrès que de voir réapparaître de multiples petits nationalismes locaux ? Le progrès pour une nation comme la France n'est-il pas de pouvoir parler une même langue - le français -, de s'entendre et de coopérer pour un même idéal républicain : la France une et indivisible ?
Historiquement, le français fut imposé à toutes les régions françaises. C'était l'idée de la révolution française de 1789, de créer un Etat-nation républicain où les différences seraient effacées par le fait que les Hommes possèdent tous la même raison. Cette philosophie du droit naturel voulait unifier plutôt que diviser les Hommes. Pour unifier, la langue commune était nécessaire. Bien entendu, pour cela , il y eut une lutte contre les dialectes locaux. Mais ce fut certainement la chance de la France que de connaître cet idéal républicain de la raison, plutôt qu'un idéal romantique dans lequel exacerber les différences est une qualité. Des pays comme l'Italie ou l'Allemagne ne se sont pas réellement regroupés sur des critères géographiques, mais surtout sur des critères de langue italienne ou de langue allemande. En fait, c'est une langue commune qui crée des traditions communes ainsi que le sentiment d'appartenir à une communauté unie.
Bien sûr, il ne faut pas comprendre dans ces propos, un quelconque nationalisme français, allemand ou italien. Je crois à l'inverse que faire resurgir les dialectes locaux entraîne des nationalismes régionaux dangereux pour une communauté. Au siècle des Lumières puis au siècle positiviste, l'idée de la raison présente chez chaque Homme, a amené à concevoir un langage universel comme un idéal. En effet, parler le même langage, c'est éviter les ambiguïtés. C'est s'entendre au sens propre du mot. Bien sûr, cette idée est transcendantale puisqu'elle ne peut s'appliquer, et les recherches d'une langue universelle n'ont jamais abouti. L'espéranto par exemple, n'est jamais utilisé. Cependant, l'idée d'une langue pour tous les Hommes existait déjà au temps de la Bible, avec la fameuse tour de Babel : Dieu, pour affaiblir les Hommes qui devenaient trop ambitieux, leur donna différents langages, et les premiers conflits apparurent. Du côté de la science, le langage universel est nécessaire. La nomenclature dans les domaines scientifiques a permis les échanges et donc le progrès. Que ce soit en botanique ou en mathématiques, l'utilisation d'une même langue pour les scientifiques du monde entier, a permis de faire des découvertes inespérées autrement. Les livres scientifiques des anciens, qu'ils soient grecs ou romains, ne nous sont d'aucune utilité du point de vue scientifique, puisque nous ne savons pas de quels objets ils parlent. Au plus peut-on parler de romans scientifiques.
Si l'on considère l'Homme, comme Fichte, avec une sphère d'activité et d'influence, le langage est primordial. En effet, le langage est le matériau dont se sert l'influence pour interférer avec d'autres individus. Le langage devient le mode légitime de communication, par un tutoiement réciproque. C'est un mode non-violent d'échanges. Cependant, comment ne pas faire violence si l'autre ne nous comprend pas, et réciproquement ? Le langage commun est, encore une fois la chance d'une communauté de s'entendre à l'intérieur d'elle-même. Cependant, la résurgence des dialectes locaux met un terme à ces échanges pacifistes. Elle entraîne la dispersion. Les régions revendicatrices d'une langue propre s'excluent d'elles-mêmes.
Encore une fois, on ne doit pas détourner ces propos de leur but premier. C'est à dire de l'idéal républicain d'union à l'intérieur d'une communauté la plus grande possible. Ce qui me semble irritant, c'est cette nostalgie du passé. Il ne faut pas regretter cette époque et vouloir fuir en arrière. Rappelons simplement qu'auparavant, dans nos campagnes, il fallait chercher l'eau dehors en plein hivers. Que les familles vivaient dans une seule pièce pour pouvoir se réchauffer. Et enfin, que le patois, comme langue orale et comme langue déformée du français, ne permettait pas d'échanges écrits avec d'autres régions. Les dialectes créent la dispersion et le repli de la communauté sur elle-même au lieu de l'ouvrir sur le monde. Bien sûr, il ne faut pas nier ce passé ou ces passés locaux. Mais pour ma part, je considère que son étude relève du travail de l'historien et qu'il ne sert à rien de le remettre au goût du jour. Enfin, lorsque je parle d'une langue communautaire comme le français, ce n'est pas dans un souci de lui donner la suprématie. Le français pour le français n'est pas l'important. C'est plutôt pour revendiquer une langue universelle qui pourrait tout aussi bien être anglaise ou autre.

 

 

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