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".
Un manichéisme dangereux :
Notre époque occidentale a vu le déploiement d'une différenciation
du sens de l'être, autour de la grande division de la Raison et
de l'Irrationnel. Cette division, qui passe pour être " philosophique
" tant la primitive langue de " la Philosophie " dans les
dialogues de Platon subit le jeu dangereux des divisions manichéennes
et porte en elle la simplification de l'opposition entre " la "
raison et " l' "irrationnel, est donc devenue un succès
" commercial " puisqu'elle s'est répandue en tant que
division sensée de l'être et sur laquelle des auteurs ont
construits de forts ouvrages savants -pour des auteurs qui, bien entendu,
sont du côté de "la raison ". Ainsi, quelques scientifiques,
des " chercheurs " de sciences exactes, par exemple membres
de l'Union Rationaliste, ont-ils pour habitude de jouer les garde-fous
de la conscience raisonnable qui peut être menacée par les
fascinations de l'irrationnel ! Et pourtant cette division ne peut être
rattachée aux dialogues de Platon dans lesquels cette division
schématique et manichéenne est, de nombreuses fois, contestée
par Socrate. Un Café pour Socrate, paru aux Editions Robert Laffont
en 1995, est écrit sur cette division et sur ces ambiguïtés.
Ainsi, Marc Sautet demande t-il l'usage du " logos " en commun
dans les débats de Philosophie dans les cafés afin de penser
aux moyens et aux raisons que nous pourrions nous donner en commun pour
éviter une guerre civile possible et qui, en même temps,
écrit, avec conviction : " La plupart des hommes ne se rendent
pas compte qu'ils vivent dans le royaume des ombres du seul fait qu'ils
se subordonnent aux besoins de leur corps. Et ce qui les y plonge davantage,
c'est qu'ils ne connaissent pas les lois de l'histoire. Le peuple croit
pouvoir satisfaire ses appétits en disposant du pouvoir de se gouverner
lui-même. Il ne comprend pas qu'il se trouve dans une situation
qui compromet l'objectif qu'il se fixe. Tandis qu'il se croit libre, il
est plus que jamais prisonnier d'une fatalité qui l'accable. La
soif de s'enrichir est telle chez certains que rien n'arrête leur
cupidité dès lors que la " liberté " règne.
Pour la grande masse, les chaînes de la nécessité
deviennent de ce fait plus serrées que jamais, sans que pour autant
la lumière se fasse : manipulés pendant un temps par ceux
qui s'enrichissent à leur détriment, ils le sont ensuite
par ceux qui leur promettent de tout partager . Et quand ces promesses
n'ont plus cours, on peut encore les distraire. D'où les montreurs
de marionnettes, dont les auteurs de comédie. Aussi difficile à
admettre que cela soit, la condition humaine est telle que la plupart
des hommes ne sortiront jamais de cette caverne. De ce point de vue, leur
sort n'est pas plus enviable que celui des morts. Du moins, de la majorité
des morts. Car là aussi, il y a un malentendu. On s'imagine en
général que la vie provient du sol. Mais c'est un point
de vue de cultivateur. Cette conviction repose sur une pratique paysanne
millénaire. Mais il est une autre pratique, un autre mode de vie,
qui indique que la vie vient du ciel. C'est la pratique des guerriers,
le mode de vie des prédateurs, des hommes qui fondent du haut de
leur repaire, ou de leur char, sur l'ennemi ou sur la proie. Ceux-là
habitent toujours au-dessus du sol foulé par le commun des mortels.
Ce sont les conquérants, les nobles, les aristocrates. Ils ont
sur la mort une perspective opposée. Lorsqu'ils meurent et que
leur corps tombe à terre, leur âme ne tombe pas avec lui
: elle ne le suit pas, elle s'élève. Elle s'élève
aussi haut que possible, et bien au-delà des nuées humides.
Venue du ciel, elle y retourne. En abandonnant la matière qu'elle
a animée, elle ne s'enfonce pas dans le sol, elle s'envole. Elle
ne peut pas s'y enfouir. Sa nature le lui interdit. Dans le corps déjà,
elle aspire toujours à s'élever. Sans doute y a t-il des
âmes basses, des âmes glaciales, des âmes humides, et
sans doute la majorité des hommes est-elle pourvue de celles-ci.
Peut-être alors, en effet, ces âmes, plus matière qu'esprit,
plus désir que courage, sombrent-elles dans les nappes d'eau souterraines
où un triste sort les attend. Mais les autres âmes, les âmes
d'élite, comment douter qu'elles s'élèvent ? C'est
pourquoi leurs " descendants " ne doivent pas croire que le
royaume des ombres leur est destiné . Lorsqu'un homme de cette
race s'éteint, son âme de descend pas chez Hadès,
elle va s'inscrire au firmament, dans la poussière des étoiles
qui l'ont précédée. " (La revanche de Platon,
Un café pour Socrate, p. 270-271) et " Ce qui semble sûr,
c'est que cette question a de l'avenir. L'heure est au bilan. Et il est
lourd. Le progrès de la société marchande se paie
très cher. Rien ne garantit qu'il poursuive sa marche en avant
au profit de tous, bien au contraire. Plus les " choses " progressent,
plus les menaces se précisent : inutile de reprendre ici la liste.
Comme à l'époque de la prospérité des anciens
grecs, un mal est à l'uvre qui ressemble furieusement au
fléau invisible dont ils étaient frappés. Emus par
les plaintes qui s'élèvent de toutes parts, les chefs d'Etat
des pays riches, qui répondent du destin de leurs peuples, promettent
de prendre les mesures qui s'imposent, dès qu'ils tireront au clair
la cause première du fléau. Mais il semble qu'ils aient
beaucoup de mal à trouver le bon oracle. D'où ma dernière
suggestion, à leur intention : s'ils n'ont pas le temps de relire
Platon, qu'ils envoient leurs émissaires à Delphes -pour
y consulter la pythie " (En guise de conclusion, Un café pour
Socrate, p. 311-312). Les références de ces deux textes,
l'existence de l'âme et d'âmes nobles appartenant à
une " race " supérieure, l'existence de la Pythie seul
véritable oracle qui pourrait répondre à la question
et au problème de la cause du fléau, ne sont pas, dans la
modernité " philosophique " universitaire, des références
raisonnables, mais " poétiques ". Or ces références
sont, pour l'économie textuelle et pour la pensée personnelle
de Marc Sautet, des références fondamentales car, à
l'instar du Socrate du Phèdre de Platon, la " mythologie "
n'est pas le monde des fictions mais de récits " sacrés
" qui impliquent l'existence et l'action des Dieux -qui existent.
Marc Sautet reprend à son compte la différence de la "
raison " et de " l'irrationnel ", mais dans le développement
de ses idées et des certitudes, reprend à son compte des
éléments qu'une certaine tradition " philosophique
" a considéré comme appartenant à " l'irrationnel
", tels l'existence de l'âme, la différence des âmes,
la possibilité d'un oracle qui transmet un véritable message
d'une entité externe au monde humain
Bousculer les oppositions sémantiques et historiques pour créer
la vraie raison :
La lecture d'un Café pour Socrate n'est pas nécessairement
aisé puisque le style de Marc Sautet mêle faits et raisonnements
compréhensibles par tous et faits et raisonnements plus "
ésotériques " ou complexes. Ce qui a occasionné
la perception d'une contradiction évidente dans la formulation
de son discours : l'adéquation de la réalisation de la pensée
philosophique avec une pensée compréhensible par tous, et
l'usage de références dont le sens et l'articulation sont
restées énigmatiques ou incompréhensibles, ce qui
à ses yeux était l'une des caractéristiques de ce
" discours des experts " qu'il honnissait. Je propose de suspendre,
pour un temps, la division de l'être en Raison et Irrationnel et
de partir du principe suivant : ce qui est vrai en un certain sens, c'est
ce qui est possible et réel -à la différence du principe
idéaliste : ce qui est vrai, c'est ce qui est " idéal
" ou Idée, et positiviste : ce qui est vrai est ce qui est
" réel " perceptible et mesurable scientifiquement. Or,
selon Platon et Marc Sautet, ce qui est possible et réel -a largement
tendance à " dépasser notre entendement " ! Lisons
: selon Platon dans " Politeia ", la condition humaine peut
être représentée par le récit dit de la "
Caverne ". Or qu'est-ce que nous raconte " la Caverne "
? : des hommes, qui se croient fermement libres, sont manipulés
mentalement de telle manière que se produit en eux une traîtresse
sensation de plaisir mental, et lorsqu'ils l'apprennent de la bouche d'un
ancien congénère d'infortune, le tuent tant ils ne peuvent
pas croire à l'incroyable qui est
qu'ils puissent être
connus et utilisés en tant qu'instruments, ce qui les rend comparables
à n'importe quelle machine. Et selon Marc Sautet " on l'ignore,
ou l'on ne s'en souvient plus. Je me permets de rappeler que la direction
du parti communiste allemand, en la personne de Thaelman, intima l'ordre
à ses " camarades " de refuser toute collaboration avec
les membres de l'autre parti ouvrier ! Etait exclu quiconque passait outre
la consigne. Quel désarroi, alors, dans le parti, quelle déconvenue,
et quel temps perdu au moment le plus important. Comment commettre plus
grosse bévue ? Mais était-ce bien une bévue ? Si
l'on enquête un instant sur cette fatale prise de position, on remonte
très facilement jusqu'à
Staline. Car c'était
Staline, le vrai " patron ". C'était lui le seul maître
à bord. C'est lui qui commandait en personne tous les partis communistes
par l'entremise de la 3ème Internationale, véritable "
courroie de transmission " des ordres venus du kremlin ! Les historiens
de cette période finiront bien par le faire savoir dans leurs manuels
: c'est Staline qui a donné ordre à la section allemande
de l'Internationale, à savoir au parti communiste allemand, de
ne pas s'allier aux sociaux-démocrates pour combattre Hitler !
Qu'on songe à la paralysie dans les rangs ouvriers au moment où
Hitler devient le kanzler ! Qu'on songe à cette incroyable défaite
sans combat (inexplicable autrement, tant la volonté d'en découdre
avec les nazis était forte), à cette cascade d'assassinats
de dirigeants ouvriers (sans distinction d'étiquette), à
ses camps de concentration improvisés où se sont laissé
parquer les milliers de cadres politiques et syndicaux (hébétés)
de la classe ouvrière, et l'on comprendra peut-être l'aide
prodigieuse que reçut Hitler de Staline. " Marc Sautet nous
raconte là un " mystère ". Comment l'ennemi de
la classe ouvrière, Hitler, a t-il pu être aidé dans
son accession au pouvoir en Allemagne par le représentant supposé
" révolutionnaire " de la communauté ouvrière
internationale ? Car ce que laisse sous-entendre Marc Sautet, à
mon avis, c'est qu'il y eut collusion amicale, et que, contrairement à
ce qu'il représentait, Staline (l'homme de fer), n'était
pas le grand frère protecteur de la communauté ouvrière,
ce que l'Histoire passée de l'ex-URSS nous montre d'une manière
particulièrement claire. Or cette collusion signifie complot contre
la communauté ouvrière. Il ne faut pas oublier que Marc
Sautet fut, dans sa jeunesse, adhérent à une organisation
trotskiste. Et dans cette organisation, Staline a toujours été
considéré comme il fut, objectivement donc un dictateur
sanguinaire. Mais dans cette collusion, Marc Sautet soupçonne plus
: un ordre mondial qui se donne pour objet entre autres de développer
et de contrôler une masse de " travailleurs " et, le cas
échéant, de massacrer dès que la situation l'exige
ces travailleurs révoltés. Nous pourrions ajouter, point
de vue personnel, que l'affichée doctrine nationale-socialiste,
ancrée dans la signalétique hindoue-aryenne, eut sans doute
un sens classique pour ses promoteurs nationaux-socialistes, soit une
société de castes-classes dans laquelle la classe des travailleurs
est subordonnée à celle des brahmanes pour lesquels l'acte
religieux par excellence est le sacrifice
Mais c'est dire aux travailleurs
qu'ils sont concrètement des jouets ! Selon Marc Sautet, ce rapport
social de pouvoir peut nous conduire, dans les années à
venir, à une nouvelle guerre civile, qui, à l'instar de
celle du Péloponnèse dans l'antiquité grecque, ruinera
l'ensemble des forces
faibles, sera une grande machine de mort.
Dans leur rapport à la dynamique du Temps de l'Histoire en train
de se faire, les " philosophes " professionnels contemporains
ont eu tendance à prendre pour repère la seconde guerre
mondiale avec les exactions qui la caractérisèrent pour
une apogée insurpassable de l'horreur et pour une Histoire qui
s'est heureusement finie le 8 mai 1945, avec le retour des démocraties
représentatives et parlementaires. Marc Sautet rappelle que l'Allemagne
nazie est sortie de la démocratie allemande, que la " démocratie
" n'est peut-être pas le plus beau nom possible pour le plus
beau gouvernement tant elle symbolise également, par le culte du
profit qui la caractérise, la communauté de tous les égoïsmes
; et il nous " prédit " littéralement, par la
comparaison Monde Ancien-Monde moderne, la guerre civile, le " retour
du boulet ".
1 - L'astrologie ou de l'exercice des forces :
C'est que j'appelle la répétition d'une prédiction
de type astrologique dont les cartes célestes représentent
des forces précises et qui, nécessairement, doivent rentrer
bientôt en rapport les unes avec les autres, de manière conflictuelle.
Car, et c'était là l'une des caractéristiques de
l'astrologie classique, l'évolution des planètes et des
configurations stellaires les unes avec les autres provoquaient nécessairement
de nouvelles configurations où, chacun sait, Mars a souvent le
beau rôle
La représentation de ce qui sera une situation
collective s'apparente au fait de : la voyance, la prophétie
Et il s'agit là d'un type d'activité universelle que "
la raison " énonce comme appartenant à son contraire,
" l'irrationnel ", et Marc Sautet lui-même reprend cette
différenciation : " Profitant du discrédit inexorable
des prêtres et des pasteurs, les médecins de la psyché
se trouvent désormais en concurrence sauvage avec les astrologues,
les numérologues, les cartomanciennes, les voyantes, les marabouts,
les yogis et autres gourous du new age. Sans être nécessairement
plus performante que toutes les variantes des " sciences occultes
" et des pratiques magiques, la psychothérapie peut du moins
mettre en avant la garantie du sérieux de ses fondements théoriques.
Mais de quelle efficience peut-elle se parer pour prendre en charge ce
qui n'est pas de son ressort ? A y bien réfléchir, les thérapeutes
excèdent de très loin leur domaine de compétence
dès lors qu'ils s'avancent sur le terrain de l'aventure humaine,
comprise dans sa totalité, dans son histoire, son développement,
ses aléas, ses régressions, ses promesses, ses espoirs déçus,
ses perspectives, avec l'impact de cet ensemble de données sur
la personne qui vient les voir. De ce point de vue, la légitimité
des sciences occultes n'est pas inférieure à celle des thérapies
de toutes sortes, bien au contraire, puisqu'elles se présentent
comme une réponse à la question de la destinée. "
Vais-je connaître le bonheur ? " Ou bien : " Vais-je rencontrer
l'âme sur ? Devenir riche ? Conserver ou retrouver la santé
? "-voilà ce qui fait l'objet d'une consultation de ce type.
(
) Il n'empêche ! Au-delà des formulations naïves
de la " demande ", et en deçà des conséquences
macabres qu'elles peuvent avoir, ce qui pousse les gens chez les praticiens
des sciences occultes, c'est la place de chaque individu dans le tout
: la fortune, l'amour, le pouvoir, tout ce que chacun peut attendre de
l'existence, sont au cur de leur démarche. En un mot, ce
qui est au cur des consultations, c'est la question du destin. Avec
la part du hasard et la part de nécessité qu'il comporte.
Car l'astronomie n'impute pas à son client la responsabilité
complète de ce qui lui arrive, il l'avertit des courants favorables
ou défavorables à ses actions et lui suggère d'adapter
ses choix aux " configurations " stellaires en place. D'emblée,
la personne qui consulte se trouve resituée dans un tout qui la
dépasse de très loin, ce qui est à priori au moins
aussi juste que de polariser toute la destinée de l'individu sur
son passé personnel et sa difficulté à l'assumer.
" (Avant-propos, Un café pour Socrate, p. 12-13). Les propos
relativement élogieux de Marc Sautet pour la phénoménologie
astrologique doit nous inciter à prendre en considération
cette annulation des différenciations et des catégories
de sens que nous avons l'habitude d'entendre et d'utiliser : le philosophe,
le sociologue, l'astrologue, le psychologue. Cette différenciation
est la conséquence du développement du système de
l'Idéalisme hégélien sur l'ensemble des universités
européennes et sur une division du travail ! Car la grâce
de cette différenciation " abstraite-concrète "
pour parler ce langage hégélien est de multiplier des experts
sur des domaines spécifiques, ce qui, dans le domaine des dites
" sciences humaines " a précédé dans l'Université
cette multiplication dans l'ensemble des domaines du travail industriel,
de la mécanique des fluides à la médecine. Or Marc
Sautet conteste pratiquement, par son récit astro-socio-psycho-logique-nomique,
cette division du travail et du sens,
, conteste pratiquement la
machine universitaire, et notamment la machine des U.F.R. de Philosophie.
Et Marc Sautet le dit d'ailleurs très clairement : "Passons
à l'Université ! Certes, le sort des universitaires paraît
plus enviable. Sans même parler des conditions de travail en tant
que telles (nombres d'heures de service, montant du traitement, "
population " à former
), il semble que le professeur
d'université se trouve dans une situation moins délicate
sur le plan éthique, puisque sa liberté d'action est nettement
plus grande que celle du professeur de lycée : les programmes soient
moins contraignants, il peut déployer son enseignement autour d'un
axe de recherche personnelle, n'a de comptes à rendre à
personne sur ce qu'il dit
Mais, en réalité, sa relation
avec l'Etat, son employeur, en change pas : il continue de vendre ses
services. Qu'il le veuille ou non, il vend son enseignement, et, à
moins de refuser de le qualifier de philosophique, il doit bien admettre
qu'il vend de la philosophie et, par conséquent, qu'il fait de
la philosophie une marchandise. (
) Encore faudrait-il savoir par
quelle voie il a obtenu son poste. Qu'on interroge donc ceux qui ont réussi
à se faire coopter dans le corps des professeurs d'université
! Qu'on interroge, avant tout, ceux qui ne sont pas encore cooptés,
ceux qui occupent encore le rang subalterne de maître de conférences
et, surtout, ceux qui convoitent un poste, ceux qui n'en peuvent plus
d'attendre une promotion, après des années de bons et loyaux
services dans le secondaire, ou ceux qui, tout frais émoulus de
la dernière promotion de l'Ecole Normale Supérieure, sont
hantés par la perspective de devoir y faire leurs classes ! Qu'on
les interroge tous, et l'on verra quel traitement ils doivent infliger
à leur éthique pour franchir l'obstacle. Que de visites
faut-il faire pour préparer une candidature ! De quelle courtoisie
il faut faire preuve ! Que de diplomatie il faut déployer ! Quels
compromis il faut passer pour entrer dans les plans de ceux qui disposent
d'un pouvoir ! A n'en pas douter, la fin, ici, justifie les moyens. "
! Cette " secte " bureaucratique qui a une passion religieuse
pour le terme et les manuels de " l'éthique ", l'Université,
est, selon Marc Sautet, peuplé de petits machiavels pour lesquels
la " fin justifie les moyens " ! Ce n'est pas ici que nous pourrons
étudier l'état général de l'Université
Française (cf. " La recherche philosophique en France ",
rapport de la commission présidée par Pierre Magnard et
Yves Charles Zarka, 1996) mais ce que nous pouvons indiquer, c'est que
les U.F.R. de Philosophie dans les universités françaises
sont actuellement des serpents qui se mordent la queue dans la mesure
où l'objet des études philosophiques est
"la
Philosophie ", ce que les autorités universitaires désignent
de ce nom pour rassembler des auteurs dans le corpus ! Dans ce nid de
serpents où les bonnes manières dissimulent un égoïsme
bien compris, les petits machiavels se prennent donc dans les filets de
la manipulation psychologique où il s'agit d'apparaître -plutôt
que d'être, d'émettre les signes de la vassalité et
de l'ortho-doxie intellectuelle -plutôt que de penser. Et ainsi
Marc Sautet ajoute une corde à son arc lyrique : la " psychologie-nomie
". C'est en effet ce qui constitue la trame de fonds de " Un
café pour Socrate " : ce que pense Nietzsche et pourquoi,
ce que pense Platon et pourquoi, ce que pense le " peuple démocratique
" actuel et pourquoi.
(à suivre)
Des lecteurs de l'Incendiaire éprouveront peut-être une
certaine surprise à lire cet article par lequel j'entends rendre
hommage à la personne de Marc Sautet, s'ils ont en effet lus l'article
que j'ai fait paraître dans cette même revue sur Marc Sautet
( ). C'est que, bien que nous ayons cessé de collaborer depuis
1 an et demi et après que je me sois expliqué sur les accusations
que j'estimais être en droit de porter sur la nature de ses actions
et de certains de ses propos, Marc Sautet, après la révélation
de sa maladie, a décidé de m'écrire et me demander
que nous nous renvoyons pour travailler ensemble sur certains projets
d'éditions. Par sa lettre, il a manifesté une certaine compréhension
des griefs que je lui avais adressé -partagés par Jean-François
Chazerans- et il semble que sa dernière intervention radiophonique
lui ai permis d'affirmer que les débats de Philosophie dans les
cafés devaient être animés par une réelle orientation
de pensée commune sur notre temps et sur ce que nous sommes, ce
que j'approuve entièrement et défendrai dans un article
à paraître dans les colonnes d'un prochain numéro
de l'Incendiaire sous le titre " Y a t-il des débats de Philosophie
en France ? "
(1) cette formule n'est nullement péjorative !
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