Pourquoi la philosophie est-elle devenue si populaire ? (Suite et fin)


...Pivot : alors pourquoi les gens viennent aussi... alors je vous pose la question à tous les deux, viennent dans votre cabinet pour, si je comprends bien, vous parler ou vous entendre parler, pourquoi viennent-ils ? Ils viennent, ils acceptent de dépenser 300 F. ch'ais pas combien...
Sautet : C'est là je crois, il faut faire un un clivage. Y'a, y'a... euh...
Pivot : non, non, répondez à la question...
Sautet : oui, je vais y répondre, un instant... Il y a la philosophie, en quelque sorte euh, sur mesure qu'on peut faire au cabinet, et puis il y a la philosophie alors en prêt-à-porter, je ne veux pas dire en prêt-à-penser, qui est sur programme avec sanction [inaudible] à l'université au lycée. Pourquoi n'avoir que cette philosophie-là et pas la philosophie sur mesure. Bon ! le cabinet il est fait pour ça. Il y a des gens qui n'ont pas envie de se soumettre à un cycle, à un cursus universitaire, qui n'ont pas envie d'amphithéâtre, ou de TD, et d'être à 30 ou à 40 dans un lieu pour apprendre de la philo, ils viennent au cabinet. Alors je crois que de ce point de vue-là le cabinet, il faut être clair, se substitue effectivement, comme du sur-mesure à du prêt-à-porter. Le café c'est un peu autre chose quand même. Le café, c'est là que à mon avis André n'est pas encore à jour dans son expérience, puisqu'il n'est pas venu...
Comte-Sponville : c'est ce que j'ai dit moi-même.
Sautet : non mais je crois... c'est correct quand tu dis ça mais je crois qu'il faut aller au bout, parce que tu évoques la parole et en même temps tu passes à l'écrit. Donc il me semble qu'il y a quelque chose là à creuser. Michel n'a pas tord : au café il se passe quelque chose. Alors c'est vrai, on vient draguer aussi. On vient flatter son ego parce qu'on vient parler, et on vient draguer, on vient nouer des contacts, il y a des couples qui se font et se défont, mais il y a quelque chose de beaucoup plus fort que ça. Premièrement on vient parler ça c'est sûr, et même si par là on flatte son ego et on drague, on a une chance d'être écouté, et ça c'est pas rien. Il me semble que dans la démocratie quelque chose s'est passé qui était catastrophique : on a délégué la parole et en même temps on a pensé, à des députés, voire à des ministres, et puis à des experts et aujourd'hui, en quelque sorte, les cafés seraient des lieux dans lesquels on récupère on se réapproprie sa pensée et sa parole. C'est là que le clivage s'opère entre nous. J'ai l'impression moi, que la philo ne se fait pas dans le monologue, elle se fait peut-être par écrit parfois, mais à ma connaissance elle s'est forgée dans la discussion publique, libre, avec des inconnus et avec des risques. Et donc par la parole et pas par le texte. Et si on dit c'est par les livres que ça passe, moi je serais d'accord. Prenez ce petit extrait. En fait on est parti d'un thème qui est relativement connu qui est : "tu gagneras ton pain à la sueur de ton front", c'est une référence qui n'est pas philosophique. Elle est théologique ou biblique. Et alors elle est commune. A partir de là, croyez-le ou non, les extraits qu'on a vus sont plutôt cocasses, mais le débat qui nous a, euh, tous, euh, en quelque sorte concentrés les uns avec les autres, a été un débat tel, qu'on s'est écouté pour de bon, mutuellement, dans mon café en tout cas quand quelqu'un parle tous les autres écoutent. C'est pas rien, c'est rarissime ça d'être sûr d'être écouté, quand je parle on m'écoute et quand on parle j'écoute, c'est moi qui distribue la parole en conséquence. Ce qui fait quoi ? Ce qui fait qu'au bout du compte, même si on arrive à rien, il y a un moment où on se dit : tiens, avec les mêmes mots on ne comprend pas la même chose. C'est extrêmement important. Et parfois c'est l'inverse : tiens avec des mots différents on comprend, et on le savais pas, qui était équivalent, c'est colossal ! c'est dérisoire vous me direz pour l'instant...
Pivot : Oui mais... c'est vrai qu'on se dit qu'il vaut mieux fréquenter les cafés philosophiques que de prendre du Prozac ou de... de... d'entrer dans des sectes... ça ça paraît... je crois qu'on sera tous d'accord là... là... là-dessus...
Comte Sponville : Une histoire qu'on m'a raconté récemment : c'est un Dominicain et un Jésuite qui vont successivement voir le Pape. Et le Dominicain demande en audience privée : votre Sainteté, quand je suis en train de prier, est ce que j'ai le droit de fumer ? Le Pape répond : ah non ! quand vous priez vous ne fumez pas ! Arrive le Jésuite, deuxième audience privée. Le Jésuite demande : votre Sainteté, quand je suis en train de fumer est-ce que j'ai le droit de prier ? Le Pape répond : eh bien, bien sûr ! quand vous êtes en train de fumer vous avez le droit de prier ! [Rires] Quand je suis au café est-ce que j'ai le droit de philosopher ? Bien-sûr. Quand je fais de la philosophie est-ce que je dois aller au café ? Ah ! là on est plus perplexe. Je trouve qu'un amphi de Sorbonne, qu'un séminaire, même qu'une conférence est peut-être plus judicieux. Autrement dit je crois encore une fois, le fait que les gens s'intéressent à la philosophie, que ce soit au café, que ça soit dans nos amphithéâtres, que ça soit dans des débats publics ou des séminaires, c'est évidemment positif si vous voulez. Et je ne voudrais pas donner le sentiment de celui qui a tous ses livres chez lui, qui travaille etc... qui.. qui aurait je ne sais quelle condescendance imbécile pour ceux qui font de la philosophie au café. Ce que je voulais seulement rappeler c'est que le dialogue est une grande chose, c'est vrai que Socrate pratiquait ça merveilleusement, mais au fond nous ne sommes pas euh... Socrate. Il ne faut pas, me semble-t-il, couper la philosophie du rapport qu'elle entretient toujours à son passé. Je crois qu'au fond, en philosophie, où il n'y a pas de progrès, la philosophie présente, vivante, se nourrit de ce rapport interne, consubstantiel, à son propre passé, qu'elle ne cesse de reprendre, de méditer, de prolonger. Pas du tout pour s'y enfermer. Encore une fois, il ne s'agit surtout pas de réduire la philosophie à l'histoire de la philosophie. Il s'agit de rappeler que nous sommes ces nains sur les épaules des géants. Que nous sommes nourris par un passé considérable et que la parole peut servir à transmettre ce que nous, nous avons trouvé dans les livres. Il ne s'agit pas de faire lire Kant par tout le monde, il s'agit en effet d'essayer de transmettre malgré tout un enseignement.
Pivot : mais alors André Comte-Sponville quand vous publiez aux PUF, Impromptus, qui sont une succession de chapitres, euh, indépendants les uns des autres, d'articles, est-ce que vous faites de la philosophie quand vous parlez, par exemple, de la correspondance ou de vos deux musiciens préférés, à savoir euh, euh donc euh Mozart et...
Comte Sponville : Schubert. Non mais là moi je...
Pivot : Attendez, je finis ma question.
Comte Sponville : Excusez-moi...
Pivot : j'ai envie de dire : vous n'êtes plus un philosophe, vous êtes un littérateur, vous êtes un écrivain et vous vous exprimez sur des choses que vous aimez ou sur des choses que vous avez observées mais ca n'est plus de la philo.
Comte Sponville : Ecoutez, je pense qu'en effet c'est autre chose et c'était un peu le... le pari de... de ce livre. Je crois que c'est un livre d'un philosophe sans être vraiment un livre de philosophie. Au fond, on a le droit d'essayer plusieurs choses. Quand Rousseau a écrit le Contrat Social, c'est assurément un livre de philosophie, chef-d'œuvre éternel, quand il écrit les Rêveries du promeneur solitaire, est-ce que c'est de la philosophie ? Certainement pas, c'est un chef-d'œuvre éternel qui n'est pas non plus simplement un livre sans rapport avec la philosophie, parce que ça reste le livre d'un philosophe...
Pivot : oui mais attendez, c'est publié dans la même collection en plus...
Comte Sponville : oui, parce que moi je...
Pivot : aaaaaah...
Comte Sponville : suis fidèle à mon éditeur et à mon ami qui dirige cette collection...
Pivot : vous allez égarer le lecteur là...
Comte-Sponville : Je le dis moi-même dans l'avant-propos. J'ai eu envie d'essayer autre chose. Autrement dit, ces petits textes sont écrit sous la double invocation de Montaigne et de Schubert. Et dans les Essais de Montaigne, il y a des pages qui sont assurément philosophiques, l'apologie de Raymond Second a été mis au programme de l'agrégation il y a quelques années, il y a d'autres pages, dans le même livre, dans le même livre de Montaigne, les Essais, qui ne sont pas du tout de la philosophie. Il n'en reste pas moins que dans les deux cas c'est Montaigne, c'est un homme qui essaie de penser sa vie, de vivre sa pensée, qui est profondément philosophe en tout même quand il écrit quelque chose qui est, en effet, plus proche de la littérature.
Pivot : Est-ce que... Luc Ferry, est que vous avez l'impression, comme les deux animateurs de café, est-ce que..., philosophique, j'ajoute, est-ce que vous avez l'impression, parce que vous écrivez des livres qui sont lus, qui ont la chance, qui ont le mérite, d'être lus par des dizaines et des dizaines de milliers de lecteurs, que vous faites, je dirais, que vous faites du social ? C'est-à-dire que vous voulez changer un peu les individus, je ne dis pas changer le monde parce que ça serait quand même beaucoup, mais changer les individus qui vous lisent, que vous avez l'intention de changer les gens qui viennent vous voir dans les cafés ?
Ferry : Ben c'est vrai que... que les lettres que je reçois sont des lettres extrêmement touchantes de ce point de vue là, parce qu'on reçoit des lettres de remerciement de gens qui ont vraiment lu le livre et qui ne sont pas du tout des professionnels de la philosophie, ça, ça reste dans le sens de ce que vous dites et en même temps moi ce que j'aurais envie de rappeler à ceux qui nous regardent ou nous écoutent, ou peut-être les deux, d'ailleurs on ne sait jamais à la télévision, c'est de leur dire que, bien sûr, et nous avons tous cédé un peu à ça ici, penser par soi-même c'est l'idéal mais c'est un résultat, c'est pas un point de départ, c'est ça que j'essaye de dire, par rapport à ces cafés philosophiques, que je trouve par ailleurs éminemment sympathiques et plus que sympathiques, je crois que c'est important, mais en même temps j'aurais envie que les gens comprennent bien que penser par soi-même bien-sûr c'est l'idéal absolu, bien-sûr c'est ça que nous vivons tous, mais que il faut d'abord commencer par penser par autrui, encore une fois sur une question aussi banale que la question du sens de la vie, il y a eu tellement de réponses constituées et tellement de réponses formidablement fortes, que si on ne commence pas par les comprendre un peu, comprendre ce que les bouddhistes ont répondu, comprendre ce que les chrétiens ont répondu, comprendre ce que les marxistes ont répondu, ce que les philosophes grecs ont répondu. Si on ne passe pas par cette médiation, je dirais qu'on n'a aucune chance de penser par soi-même. J'ajoute une petite chose, juste une phrase si vous le permettez. Ce qui me frappe dans la plupart des interviews, des micro-trottoirs, c'est que les gens commencent à mettre le moi en avant, ils disent moi personnellement, à mon avis, je pense que, et suis une banalité intersidérale du type : on n'arrête pas le progrès, et je crois que c'est ça qui faut éviter, même si on est très démocrate, même si on pense que c'est bien que les gens s'expriment, il faut leur faire comprendre aussi qu'il faut passer par la médiation d'autrui.
Pivot : Michel Seuve.
Seuve : Simplement les livres d'André Comte Sponville ou de Luc Ferry sont lus, je dirais, à plus grande... enfin par les personnes qui viennent fréquenter les cafés-philosophiques. Lorsque l'on parle de la philosophie...
Pivot : Attendez... Il y a une nouvelle société qui est en train de se former ? C'est quoi ?
Seuve : Il y a un accès aux réponses... il y a un accès aux réponses ici, et je crois que vous proposez des réponses ou des solutions, qui... qui... qui font mouche. Et je crois qu'il y a parmi les personnes qui viennent dans les cafés-philosophiques, beaucoup... Compte Sponville... hochent la tête... je crois qu'il y a...
Pivot : Ca ne vous fait pas envie à vous Jean-Luc Marion de participer à ce débat ?
Marion : Ca me fait envie et j'y participe, mais ce que...
Pivot : mais non, vous n'y participez pas.
Marion : mais si...
Pivot : mais non, vous n'y participez pas.
Marion : Ce que je retiens de ce qu'a dit Sautet, une chose très précise : les gens y viennent pour que la parole leur soit rendue. Mais le gros problème c'est que il ne suffit pas de prendre la parole pour penser, il ne suffit pas de prendre la parole pour dire quelque chose. La grande question c'est d'arriver à ce que la structure éventuellement dialogique puisse être pensante, mais comme disait Deleuze, qui parfois était violent, un vrai philosophe ne dialogue jamais. D'une certaine façon, il faudrait que dans cette situation anthropologique admirable mais qui en soi ne remplit pas tout, n'a... n'a... n'a pas toutes les vertus du dialogue ça pense, et pour ça, ça s'apprend. Et d'ailleurs on apprend à penser, on apprend... on apprend le concept. Le concept est quelque chose d'extraordinaire. C'est un mot, mais c'est un mot qui en dit plus que ce que vous dites quand vous le prononcez, c'est-à-dire qui continue tout seul...
Pivot : oui.
Marion : Et qui engendre une autre pensée derrière qui est prise avec. Alors le maniement du concept, ça consiste, en clair... quelque manière, à avoir des... des... des unités qui ne se laissent pas penser n'importe comment et qui continuent leur chemin. alors le dialogue c'est intéressant si les gens se mettent à parler philosophie, c'est-à-dire à parler avec du concept et là, c'est une question d'apprentissage, c'est une ascèse et c'est la seule manière de ne pas se mentir à soi-même ce qui est quand même la chose au monde...
Seuve : la chose au monde...
Marion : la plus difficile.
Pivot : surtout pour un philosophe
Marion : oh, pour les autres aussi
Pivot : oh si quand même. Alors eh... eeeh... eh... la... la... la philosophie est à la mode mais au cinéma aussi, au cinéma, il y a beaucoup d'enseignants en philosophie dans les films d'aujourd'hui, y'en... vous avez... moi j'en ai recensé trois. Y'a Forever Mozart de Jean-Luc Godard, Encore de Pascal Bonitzer et Comment je me suis disputé. Ma vie sexuelle, d'Arnaud Despleschin. Il y en a un autre ?
Comte-Sponville : le film de Téchiné...
Pivot : ah oui, le film de Téchiné, voilà, j'en cherchais un quatrième, qui s'appelle ?...
Comte-Sponville : dont le titre m'échappe mais...
Pivot : oui, bé, comment il s'appelle le film de Téchiné ? Allons... J'ai oublié... bon... avons oublié... bêêê ,dans le dernier film de Téchiné effectivement il y a un professeur de philosophie. Et puis les films d'Eric Rohmer, on a beaucoup parlé de philosophie, Ma nuit chez Maud, Les contes de printemps, et puis à la télévision. Alors y'a de la philosophie à la télévision et il semble qu'il y en aura un peu plus. Sur Canal + il y a l'émission hebdomadaire de Michel Field Pas si vite, avec Agnès, qui dure, je crois 5 à 10 minutes. Sur la Cinquième, i y'a Cogito, émission de 13 minutes de Paula Jacques autour d'un philosophe. Alors d'ailleurs voilà, on peut se procurer les cassettes de Cogito, Aristote, Epicure, les Stoïciens, voilà... c'est publié par la Cinquième, et puis sur France 3 en préparation, un magazine sur la philo qui va s'intituler Graine de philo, de 52 minutes, avec Alain Etchégoyen...
Ferry : Grain de philo...
Pivot : Ah oui, Grain de philo.
Ferry : c'est un petit jeu de mots: grain de folie / grain de philo
Pivot : avec Sophie Agasinski et Luc Ferry. Alors pourquoi vous... vous y croyiez à la philo à la télévision ?
Ferry : je vais vous répondre franchement : non. C'est-à-dire je ne crois pas que l'on puisse penser à la télévision, sinon ça se saurait. J'ai toujours pensé que c'était pas là qu'on pouvait vraiment faire un travail de fond. Et en même temps, une fois que j'ai dit ça, je ne suis pas du tout critique à l'égard de la télévision parce que je pense que le vrai effet intellectuel de la télévision c'est ce que ça produit après dans les discussions privées dans les familles, dans les foyers, et je pense qu'on produit beaucoup plus de réflexion après, une fois que l'émission est terminée, parce que les gens vont discuter entre eux et parce qu'ils vont parler du sujet de l'émission que dans l'émission elle-même où il est bien évident que ce qui se passe c'est des émotions, des sentiments, c'est des convictions éventuellement, mais pas des idées, pas des concepts comme les définissait Jean-Luc tout à l'heure parce que ça, ça ne peut pas passer à la télévision, c'est impossible, mais en même temps ce qu'on peut faire passer, encore une fois, c'est des convictions et des thématiques fortes que les gens après...
Pivot : 'faut...
Ferry : vont continuer à discuter.
Pivot : 'faut... c'est des cafés philosophiques que vous allez faire là...
Ferry : mais moi je ne suis pas du tout hostile aux cafés philosophiques, je trouve ça formidable les cafés philosophiques... mais il ne faut pas qu'il y ait d'illusion sur les cafés philosophiques mais je ne pense pas d'ailleurs que vous les entreteniez, d'ailleurs vous-mêmes dans les livres que vous écrivez, moi j'ai lu Marc Sautet, il est aussi historien de la philosophie, il est aussi quelqu'un qui est capable de parler de Nietzsche ou de Marx avec compétence. Mais moi je crois que c'est ça qui est important, c'est qu'on sache bien que c'est pas simplement les concepts comme disait Jean-Luc, même si je suis d'accord avec ça, mais y'a aussi l'histoire des grandes visions du monde et cette histoire des grandes visions du monde elle est absolument indispensable pour penser aujourd'hui. Donc encore une fois, penser par soi-même c'est un idéal, c'est pas quelque chose qu'on a au départ, au départ, il faut être honnête, on a des banalités et des lieux communs, d'ailleurs c'est ce que disait Aristote, les lieux communs c'est le point de départ de la dialectique. On repère d'abord les lieux communs et on essaye d'aller plus loin, mais pour aller plus loin, il faut passer par cette médiation de l'histoire de la philosophie.
Pivot : Alors, Grain de philo commencera euh, première diffusion 18 janvier et l'animateur en est Alexandre Baloud. Alors vous participez à la première, quel sera le thème de la première ?
Ferry : le thème de la première c'est la corruption...
Pivot : ah bon...
Ferry : la corruption qui peut s'entendre aussi bien au sens...
Pivot : vous prenez un thème d'actualité alors...
Ferry : j'allais dire au sens politique du terme mais c'est peut-être pas ce qu'il faut dire, mais aussi au sens philosophique du terme, c'est-à-dire la corruption c'est aussi la mort hein...
Pivot : et puis on annonce aussi peut-être d'autres magazines de philo l'année prochaine notamment sur la cinquième donc y'a pas... alors là aussi donc... c'est intéressant de voir de ce mouvement au cinéma, à la télévision, y'a de la philo partout.
Marion : Soyez honnête... soyons honnêtes, c'est aussi... c'est aussi dans l'édition, parce que j'veux dire, il faut se rendre compte du travail qu'on fait les éditeurs. Moi, je pense, depuis 20 ans, depuis que [inaudible], dans les années 60-70, la philosophie était complètement réduite, et puis il y a des éditeurs qui y ont cru, qui ont travaillé, naturellement les PUF, dont je ferais l'éloge mais d'autres aussi, les nouveaux éditeurs, les petits éditeurs qui n'existaient pas y'a 10 ans, qui jouent un rôle extraordinaire, une vieille maison comme Vrin, etc. Des gens qui ont cru à la... aux grands textes, à la permanence de... de... de... c'est extraordinaire ça, c'est un événement...
Pivot : oui
Marion : qu'on ne trouve pas...
Pivot : oui
Marion : hors de France.
Comte-Sponville : un dernier élément pour expliquer ce succès de la philosophie spécifiquement en France. Jean-Luc Marion a raison de dire que c'est spécialement vrai pour la France, c'est la démocratisation de l'enseignement. Dans les années 50 les gens qui avaient fait des études de philosophie, qui étaient allés jusqu'au baccalauréat, c'était quoi ? 5%, 10% de la population. Si on arrive à 70% d'une classe d'âge au niveau du baccalauréat ça veut dire que 70% des jeunes adultes d'aujourd'hui ont fait des études de philosophie. Ce qui montre autre chose, c'est que quand on touche à la philosophie, au fond, on aime ça, on en redemande, ce qui est tout à l'hommage de la philosophie comme discipline, mais aussi de nos collègue du secondaire. Je crois que le succès de la philosophie en France aujourd'hui doit beaucoup à ces quelques milliers d'enseignants qui en classe terminale, tous les ans, commencent à transmettre justement cette tradition, ces trésors de pensées qui ont été accumulés durant 25 siècles, que nous avons reçus et que donc nous avons à charge en effet de transmettre.
Pivot : alors je signale que Le Monde de l'Education, Le Monde de l'Education que dirige Jean-Michel Vian va paraître à la fin du mois de décembre sous le titre Le Monde de l'Education de la Culture et de la Formation, avec un numéro entièrement consacré à la philosophie et aux cafés littéraires du XVIIè siècle à nos jours, c'est vrai les cafés littéraires, vous êtes à la suite, de ces cafés-philos... de ces cafés littéraires, et donc c'est un numéro complet, et je crois vous ouvrez le bal, me semble-t-il Luc ferry, voilà donc euh... ça s'appelle Le Monde de l'Education et c'est à partir du 22 ou 23 décembre. J'ai reçu une lettre de par exemple... alors dès que j'ai eu l'annonce de cette émission, le nombre de lettres d'animateurs de cafés philosophique, mais c'est... c'est incroyable ! alors là effectivement Jean-Claude Aguerre anime tous les dimanches matin, à la place de la messe là encore...
Sautet : au Luxembourg
Pivot : hein ?
Sautet : au Luxembourg
Pivot : au Luxembourg à Paris, euh... il m'écrit : "psychanalyste, membre de l'école lacanienne de psychanalyse, cette expérience est pour moi source d'un enseignement particulièrement riche, totalement inattendu, les discussions empruntent souvent des chemins insoupçonnés, elles sortent toujours des sentiers battus et portent sur les concepts abordés un éclairage particulier que la littérature philosophique ou psychanalytique présentent rarement". Mais pourquoi la... alors... la presse est très souvent moqueuse, ironique à l'égard des café-philos ?
Sautet : Elle est de formation universitaire donc... c'est pas complètement illogique...
Pivot : ben, attendez. Ce sont des universitaires et ils n'ont pas dit du mal des cafés philosophiques !
Sautet : non, non, attendez...
Pivot : mais c'est fini là... Simplement je voudrais montrer votre livre. Vous avez une collection qui est aux éditions Jean-Claude Lattès. Vous avez interrogé les philosophes sur des sujets d'aujourd'hui et de tous les temps donc, Des femmes et de leur émancipation, il y a une douzaine de philosophes qui sont cités sous forme de dialogues avec vous...
Sautet : ben, moi ça me fait du bien parce que c'est vrai qui y'a une tendance, y'a un risque quand on est dans les cafés ou même au cabinet hein... à la baisse, je dirais au niveau conceptuel et que m'entretenir avec Maïmonide de temps à autre...
Pivot : et puis je signale un CD-ROM sur Descartes. Sur Descartes, vous connaissez Jean-Luc...
Marion : Descartes oui [rires]
Pivot : vous le connaissez ? c'est pas bien ?
Marion : oaf !
Pivot : bon, c'est au Joli Ciel
Marion : ben oui !...
Pivot : vous préférez...
Marion : les cafés jolis...
Pivot : vous préférez les cafés... bon écoutez alors euh... donc, simplement, tous ces livres, il y en a d'autres encore dans mon bureau, ils sont des collections de poche de philosophie de textes donc classiques de la philosophie, qui valent sûrement pas chers, bon, je vais pas vous les montrer. Il y a aussi des nouveautés aux Presses Universitaires et dans d'autres maisons. Il y a des... des ouvrages nouveaux, il y a des... des dictionnaires, comme le dictionnaire Mythes et mythologies chez Larousse, enfin il y a plein d'ouvrages sur la philosophie, nouveautés, rééditions en livres de poche, alors vous faîtes 3615 Qui-n'en-veut sur le minitel ou bien vous faites internet...
Ferry : on peut signaler un livre ?
Pivot : oui attendez et puis je finis. Et puis... pa...ce que ça va être... c'est très consulté, sinon vous écrivez à France 2, voilà... avenue Montaigne... vous vouliez ?
Ferry : un très très bon dictionnaire de philosophie politique de Philippe Reynault et Stéphane Rigal [???] qui vient de sortir aux PUF et qui est vraiment excellentissime. Que aussi tout le monde peut lire
Pivot : très bien...


FIN.

 

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